Mets la gomme : Même pas peur

Publié le 2 juin 2025 à 07:00

Un regard écarquillé, une bulle fragile, une abeille posée là, comme par hasard.
Cette illustration capture un instant suspendu, un équilibre précaire entre l’innocence d’un geste et l’imprévu du monde extérieur. C’est drôle, un peu inquiétant, et surtout, terriblement humain.
À travers ce dessin, j’ai voulu raconter sans paroles, en laissant l’image vibrer entre tension, légèreté et absurde. Et aujourd’hui, j’ai envie d’en dire un peu plus.


L’instant figé et le mouvement intérieur

Tout part d’un geste banal, presque enfantin : souffler une bulle de chewing-gum. C’est une action anodine, légère, à laquelle personne ne prête vraiment attention. Et pourtant, dans cette scène, ce moment prend une toute autre dimension. Il est figé dans le dessin, comme une photographie mentale d’un instant suspendu — ce court laps de temps entre le calme et le chaos.

Ce qui me fascine ici, c’est justement ce contraste entre l’apparente immobilité de l’image et l’intensité de ce qui se passe à l’intérieur. Car si le personnage semble figé, son regard, lui, raconte une histoire : il est écarquillé, surpris, peut-être même paniqué. Il trahit l’irruption de l’imprévu, du réel qui bouscule. Une abeille vient se poser là, comme une menace douce, une perturbation minuscule qui suffit à tout faire basculer. La bulle peut éclater, l’abeille peut piquer… ou pas. Tout est dans ce "presque", dans ce suspense silencieux qui crée du mouvement là où l’image est pourtant figée.

Ce dessin est une exploration de cette zone fragile entre le contrôle et la perte de contrôle. L’extérieur semble stable, maîtrisé, mais l’intérieur est déjà en effervescence. C’est exactement ce que nous vivons souvent dans nos vies : des moments où tout semble aller bien, où l’on tient la bulle, mais où l’on sent que quelque chose pourrait exploser d’une seconde à l’autre. Et ce sont justement ces instants-là qui nous rendent profondément humains. On croit qu’on gère, et puis une abeille vient nous rappeler que la vie ne suit jamais totalement nos plans.

Dans cette image, l’instant n’est pas simplement arrêté : il vibre. Il capte ce frisson qu’on ressent quand tout pourrait changer en un souffle. Et c’est ce frisson-là que j’ai voulu rendre visible.


Le pointillisme comme tempo

J’ai choisi de travailler cette image en Dot Art ou Dotwork, un style de dessin point par point que je pratique avec patience et obsession du détail.
Chaque ombre, chaque volume est construit lentement, comme une méditation visuelle. Le Dot Art impose une forme de lenteur, une attention à chaque infime variation.
Et je trouve que ce rythme posé entre en contraste parfait avec la scène représentée : une bulle prête à éclater à tout moment.
Ce style me permet de ralentir le temps là où le sujet voudrait l’accélérer. Il révèle l’ironie du moment, en le cristallisant dans une matière presque tactile.


Un titre qui claque : Mets la gomme

Le titre, "Mets la gomme", est un clin d’œil assumé.
Il joue d’abord sur le mot "gomme", en écho au chewing-gum, mais aussi à l’univers du dessin, du trait, de ce qu’on peut effacer ou souligner.
Mais il dit surtout autre chose : "mets la gomme" au sens de vas-y à fond, n’aie pas peur, prends le risque.
Même si l’abeille pique, même si la bulle éclate. Parce que ce moment, aussi risqué soit-il, est vivant.
Et on n’en a qu’un.
Ce titre, c’est une invitation à faire face à l’imprévu, à oser avancer même quand tout semble incertain. À se lancer, sans attendre le moment parfait, car il n’arrive jamais.


Un dessin, mille lectures

Comme toujours, je laisse une grande place à votre interprétation.
Ce dessin n’est pas une leçon, ni une vérité figée. C’est une suggestion, une invitation à voir, à ressentir, à projeter ce que vous êtes au moment où vous le regardez.
Vous y verrez peut-être un souvenir d’enfance, une scène de dessin animé, une métaphore de votre quotidien… ou simplement un moment absurde et cocasse.
Et c’est parfait ainsi.
L’image existe pour résonner différemment selon les regards. Pour certains, elle fera sourire ; pour d’autres, elle provoquera un léger malaise ou réveillera une émotion enfouie.
C’est là que, pour moi, l’art prend tout son sens : dans cet espace vivant entre ce que j’y ai mis… et ce que vous y trouvez.


"Mets la gomme", c’est un clin d’œil à l’instant, un hommage à l’absurde, un éloge du risque doux.
Un dessin né du silence, pour faire parler le regard.
Et peut-être aussi une piqûre de rappel : vis à fond, même si la bulle éclate.

OKI

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